Le fromage est-il aussi addictif que le laissent entendre certains médias ?
Fromage et addiction
Selon une étude publiée dans la revue Plos One et menée par des chercheurs de l’Université du Michigan aux États-Unis, le fromage serait tout aussi addictif que l'alcool, le tabac ou même la drogue ! Mais les chercheurs de cette université n'auraient-ils pas consommé trop de ces substances pour en arriver à cette conclusion ? Le célèbre magazine scientifique Sciences et Avenir a rencontré deux spécialistes en la matière, Bertrand Nalpas, directeur de recherche à l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (Inserm) et chercheur en addictologie, et Philip Gorwood, psychiatre spécialiste des addictions à l'Hôpital Sainte-Anne à Paris, afin de nous aider à mieux comprendre cette analyse !
Le fromage est addictif... vrai ou faux ?
RETOUR SUR L'ÉTUDE AMÉRICAINE

L'étude, dirigée par les chercheurs américains, a été menée auprès de 500 étudiants auxquels il a été demandé de répondre à un questionnaire sur leurs comportements alimentaires.
Cette dernière, largement relayée par différents médias qui semblent s'être en majorité focalisés sur la seule éventuelle addiction au fromage qu'elle pouvait pointer, ne se cantonnait pas à ce seul aliment mais également au chocolat, à la pizza et aux frites.
Et au final, parmi tous ces aliments, un étudiant sur cinq a retenu le fromage comme étant l'un des aliments les plus addictifs car il estime que sa consommation peut être difficile à contrôler mais toutefois « à des degrés jugés faibles, 3 points sur une échelle allant de 1 à 7 » comme le relève Serge Ahmed, directeur de l’équipe « Addiction, compulsion et syndrome de dysrégulation dopaminergique » au sein de l’« Institut des maladies neurodégénératives » de Bordeaux. Il estime aussi important d'indiquer que « l'étude ne précise pas de quel fromage il s'agit ! ». Et cette remarque nous semble importante !
Pour expliquer cette dépendance au fromage, l'étude américaine affirme que la caséine, protéine contenue dans le fromage, serait la responsable puisqu'au cours de la digestion sa dégradation libérerait de la casomorphine qui activerait les récepteurs du cerveau garants de la dépendance.


L'AVIS DES 2 SPÉCIALISTES FRANÇAIS

Cette étude semble avoir interloqué, sur différents points, Bertrand Nalpas et Philip Gorwood, rencontrés par Sciences et Avenir.
 
On ne peut parler d'addiction au fromage !

Le premier point important à préciser, selon Bertrand Nalpas, concerne la mauvaise utilisation du mot « Addiction » dans cette étude. Comme il le rappelle, ce dernier « désigne une réalité médicale précise : c'est un mode d'utilisation inadapté de substances qui conduit à une altération du fonctionnement ou à une souffrance cliniquement significative, selon la définition donnée par le DSM 5 (ndlr : le manuel de l'Association américaine de psychiatrie) »....
Second point, toujours relevé par Bertrand Nalpas « les aliments ne provoquent pas, sauf cas exceptionnels, cet effet de manque et de perte de contrôle sur soi ».
Bertrand Nalpas et Philip Gorwood sont catégoriques : « On ne peut parler d'addiction au fromage, et encore moins les assimiler aux effets sur le cerveau à ceux des opioïdes ».
Et quand, ils découvrent que cette étude cite la caséine comme responsable de cette dépendance, voici leur affirmation : « cela reste une hypothèse puisque la dépendance à la caséine n'est pas scientifiquement prouvée ! ».


LE CIRCUIT DE LA RÉCOMPENSE

On sait qu'il existe un point commun entre la dégustation d'un aliment que l'on apprécie et la consommation d'une drogue : toutes deux déclenchent l'activité de plusieurs régions du cerveau formant alors une zone nommée « le circuit de la récompense » par les scientifiques.
 
La différence entre la nourriture et la drogue est majeure

Lorsque cette zone est sollicitée, la dopamine, messager chimique (neurotransmetteur) procurant le sentiment de satisfaction, est libérée. Mais comme l'explique Philip Gorwood « La différence entre la nourriture (... et donc le fromage...) et la drogue est majeure : la première active naturellement le circuit de la récompense et entraîne donc une libération de dopamine contrôlée, alors que les opioïdes le détournent et augmentent artificiellement la sécrétion de ce neurotransmetteur ».
Ceci signifie donc que les aliments, et plus particulièrement ceux à tendance grasse et ceux qui sont sucrés, sont considérés par le cerveau comme des récompenses naturelles contrairement aux drogues.

Alors ne vous en faites pas, continuez à récompenser votre cerveau...  il n'en sera que plus heureux... car oui, le fromage, c'est la vie ! Et comme dirait Pascale : « Souriez, que du bonheur ! ».

On savait que le fromage était bon pour la mémoire ! Mais non, le fromage n'est pas une drogue, c'est NOTRE drogue !
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